Erstbesteigung der Hohneck Nordwand 1813

Le titre en allemand, c'est juste pour donner une dimension dramatique et stressante au récit qui suit, merci de votre compréhension.

Le 1er Mars 1813, au coeur d'un rude hiver vosgien, tel que l'on en n'avait pas connu depuis des décennies de mémoire de marcaire, fut réalisée la première ascension de la Face Nord du Hohneck par la branche gauche du Soldatenschlatten. Krampus Canalblog a retrouvé pour vous toutes les photos. Ici la voie empruntée par la cordée:

La cordée fut, pour être précis, composée de 2 sous-cordées rivales qui convoitaient le sommet dont la Face Nord était considérée comme le "premier mais aussi dernier problème des Vosges" pour citer Napoléon dit "le bout-en-train". La première cordée était lorraine, et bivouaquait depuis près de 20 jours sur le parking du Pied du Hohneck (une auberge mal famée à l'époque). Elle était composée de Franzis Kasparek dit "le bavard":

et de Tony Ludwigshafen von Schweinebraten, dit "Tony", car même Franzis qui adorait parler trouvait ce patronyme franchement chiant:

La seconde cordée était alsacienne. Eux ne bivouaquaient pas depuis perpète en attendant l'éclaircie, primo parce qu'ils n'avaient pas que ça à foutre, et secundo parce qu'ils avaient des mômes à la maison. Ils n'avaient donc que peu de temps et inventèrent le "style alpin", qui consiste en une course de montagne rapidement torchée. Ce "style alpin" est donc né dans les Vosges. La cordée était constituée de Perrine Stoisser alias "Stoissimütterchen", mère au foyer donc qui évoluait déjà à l'époque dans le 8a:

et d'Anderl Krampus, qui lui repoussait les limites de l'escalade en grimpant régulièrement dans le 3b pour sa part, mais c'est la lettre qui compte:

Et c'est là que ça devient le bordel entre alsaciens et lorrains (mais la frontière entre les 2 régions était du côté de Reims à l'époque), puisque bien involontairement elles se retrouvèrent au col du Falimont ce Vendredi 1er Mars 1813. A vrai dire, c'est la cordée alsacienne qui s'est lancée la première dans la conquête du Hohneck, grâce à un télégramme envoyé le matin-même par leur routeur météo dit "Bouboule le cumulo-nimbus" et la cordée vosgienne les a suivis en se disant "Moooooooon, faut pô que ce soit un sommet alsacien le Hohneck, laisse leur faire la frayée jusqu'au pied du couloir!". Faut dire aussi que le temps, malgré les prédictions de Bouboule, était bien dégueu selon Krampus, pour qui les origines mentonnaises étaient loin de constituer un avantage:

Et c'est ainsi qu'ils s'engagèrent à 4 dans le couloir du Falimont en jouant à "le dernier qui arrive en bas est un Parisien!":

Une fois parvenus au Frankenthal, les cordées durent entamer leur rude ascension en direction du Soldatenschlatten. Anderl Krampus, équipé au moins pour le Cervin et dont la surchage pondérale hivernale habituelle l'emmerdait au plus haut point, demanda une quinzaine de fois de bivouaquer dans le couloir, ce qui lui fut refusé par Stoisser, qui dut même l'assommer au niveau de la Rote Fluh pour lui remettre les idées en place:

Ils parvinrent enfin après 3 jours pas mal d'efforts au pied de la corniche, barrant l'accès au sommet. Franzis prit son courage à 2 mains et dit la formule devenue célèbre entretemps "Tu te la prends dans la gueule, c'est plus la peine d'espérer embrasser ta femme, mon cochon!":

Leurs efforts furent vains, rien ne semblait permettre l'accès au sommet. Engagés dans la voie, toute retraite était impossible si près du but. C'est alors que Perrine eut la formidable idée de sortir la corde afin de réaliser une traversée, devenue célèbre depuis: la traversée Perrine Stoisser.

Le sommet était atteint en même temps par les 2 cordées, qui avaient joint leurs forces dans cette courageuse conquête jugée pourtant suicidaire par les contemporains, et c'est ainsi qu'en signe d'amitié, et pour célébrer la mémoire de cet événement, le Hohneck devint frontière commune entre l'Alsace et la Lorraine:

Nous voici parvenus au terme de ce récit, vous comprendrez mieux dorénavant la légendaire amitié alsaco-lorraine, il ne fallait donc pas que cette conquête du Hohneck ne tombe dans les limbes de l'oubli. La prochaine fois je vous expliquerai pourquoi le Petit Ballon s'appelle le Petit Ballon, et croyez-moi ça va pas être triste.