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Vosginisme & Randonnée
17 juin 2013

L'angoisse du néophyte au moment de son premier marathon

...16 juin 2013: 8h07 et des poussières, le départ du Marathon du Vignoble d'Alsace a été donné il y a quelques minutes. Sur plus de 700 participants je suis bon dernier au passage du 1er kilomètre alors que je cours simplement à mon rythme. "Qu'est-ce que je fous là?", je me le demande...

 


Pourquoi le marathon?:


Pour faire simple: aucune idée. Je cours depuis quelques années pour le plaisir, juste pour le plaisir et participe uniquement aux 10km de Colmar en Novembre, histoire de participer à un événement sportif dans une ville que j'affectionne particulièrement. Longtemps, je n'avais jamais dépassé 10km d'ailleurs. Il m'arrivait même, il y a de cela 2-3 ans, de ne pas vraiment m'échauffer avant le 10km, parce que sinon, au bout du compte, ben ça faisait 11km, et bon, 10 passe encore, mais 11... Si le marathon est un rêve de coureur du Dimanche, alors je l'assume pleinement. La distance est mythique, précisément pour les coureurs lambda dont je fais partie. On ne se regarde pas le matin dans le miroir, 36 ans, mal rasé et bedonnant (bon, plus maintenant...), en se disant "J'vais me mettre aux 200 mètres mon coco, et p^ù*^, je vais le finir en moins de 40 secondes, tu vas voir".  Par contre, on peut aimer le sport, aimer courir, se sentir quelque peu vieilli par les précédentes années bien remplies, et se dire "Je peux y arriver." Peut-être pour se rassurer, sûrement pour le plaisir de courir longtemps et pour le voyage intérieur qui en découle...

 

Pourquoi le marathon du Vignoble d'Alsace?


Sur le papier, ce n'est pas le plus simple. Les 42,195km y sont, bien entendu, mais il faut y ajouter 400m de dénivelé supplémentaires et parfois un terrain herbeux qui ne favorise pas la vitesse. Il a par ailleurs lieu au mois de juin et, en cela, peut se disputer sous une grosse chaleur, ce qui a été le cas cette année. En revanche, au moment de commencer mes 16 semaines d'entraînement, que j'ai suivies à la lettre, je doutais de l'accomplissement futur de ce rêve. Il était donc hors de question de partir loin - Paris, Berlin, Londres...- d'y engager des sommes faramineuses pour peut-être abandonner au 27è kilomètre. "Oui, chérie, voilà on est venus en famille à Londres, ça nous a coûté 1000€ mais là tu vois j'en peux plus et je suis de très mauvaise humeur". D'un naturel plutôt stressé avant une épreuve, je savais en outre que courir au milieu de déconneurs déguisés en avions, en infirmières, en momie ou en abeilles, allait par ailleurs quelque peu me détendre. Le MVA sera donc mon premier marathon, pour la Krampussine son premier semi, ma fille participera à la course "microbes" de la veille, et mon père assurera la logisitique pendant les 2 jours passés du côté de Molsheim.

 

L'entraînement:


Je l'ai commencé fin février en remplaçant les sorties longues des 4 premières semaines par des sorties ski de fond. L'entraînement pour un marathon a nécessité quelques sacrifices me concernant. Pas évident de concilier vie familiale avec 2 enfants en bas-âge, vie professionnelle, ma passion pour la montagne vosgienne... Mes séances en semaine s'effectueront au boulot. Il faut être motivé pour sortir de 4h de cours, aller rejoindre la piste d'athlé (à 100m de mon lieu de travail, du luxe!), se doucher en 1 minute, manger vite fait en se privant du plaisir de manger avec ses amis collègues. Mais un rêve demande des sacrifices, et à force de les reporter, on les perd de vue, et puis on les oublie...Les sorties longues se feront le Samedi. Je ne culpabilise pas, ma Krampussine les fait le Dimanche, comme ça on est quitte :) 16 semaines (en 3/4 séances par semaine) c'est long. Dans mon cas, je n'ai pas enregistré toutes mes séances, mais ce sont facilement plus de 500km courus au total, dont au moins 50 tours du lac de Longemer :). Ma semaine la plus chargée a totalisé 45km dont une sortie longue maximale de 24km en 2h50, c'est un minimum.

J'ai dû durant mon entraînement me fier systématiquement à mon cardio et sur la grande majorité de mon temps d'entraînement ne pas dépasser 75% de ma Fréquence Cardiaque Maximale. Mes footings ne dépassaient qu'à peine 8km/h. Très lent, décevant même je dois avouer, mais pas le choix, on fait avec le coeur qu'on a: si je ne suis pas prédisposé à courir vite, alors je courrai lentement et très longtemps. Je ne donnerai aucun conseil sur ce blog pour un marathon, je n'en ai pas la prétention, mais il y a une chose que j'ai apprise: courir TRES lentement est fondamental pour devenir endurant. 

 

Les marathoniens sont-ils voués à être chiants?:


La question peut paraître étonnante, mais ayant choisi de suivre scrupuleusement mon plan, mon entraînement a été, par moments, une sorte d'ascèse faite de contraintes et de lubies. C'est surprenant, notamment à 4 semaines de l'épreuve, de suivre une hygiène de vie impeccable faite de repas précis, d'entraînement précis et d'obsessions (si, si), quand on sait déjà pertinemment que le temps sera très modeste. Qu'être "marathonien" et "terminer un marathon" n'est pas la même chose et qu'on fait partie de la seconde catégorie. Pas la même, mais pas moins méritante non plus je pense.  Pour mon premier marathon, m'étant entraîné seul et avec pour seuls conseils extérieurs ceux de "zweifelwilli" qui en connaît un rayon question longue distance, je prends tout ce qui vient questions produits: gels longue distance, barres, Gatosport pour mieux digérer le matin de la course, Malto pour augmenter 3 jours avant l'épreuve mes réserves énergétiques. Au moment de faire mon sac, je me rends compte qu'il est presque aussi grand que mon sac d'alpi.

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Ma femme me regarde et me dit ironiquement: "Dopé!" "Mais non chérie, tout ça c'est naturel, car..." "Armstrong!" "Enfin, Krampussine, je..." "EPO!" Bref, pas dopé, mais certainement un peu ridicule.

La course:


Après un Samedi sur place pour récupérer le dossard, visiter Molsheim en famille, admirer ma fille durant l'épreuve du 450m catégorie "microbes", une soirée Spätzle Party sur place et une nuit à Wasselonne, je suis à 8h au Cora de Dorlisheim pour le départ. Réveil trop tardif à 6h malgré une nuit agitée,  appétit zéro à 7h, alors je me force à avaler en toute hâte 1/4 de Gatosport. Pire que du gavage. Au moment du coup de feu de départ, à 8h, vers la fin de la file des concurrents, je suis encore en pleine digestion, je me sens lourd et je pars entre un mec en couches avec la crotte au cul et un marsupilami pour 42km195.

 8h07 et des poussières, le départ du Marathon du Vignoble d'Alsace a été donné il y a quelques minutes. Sur plus de 700 participants je suis bon dernier au passage du 1er kilomètre alors que je cours simplement à mon rythme. "Qu'est-ce que je fous là?", je me le demande...

Un monsieur sur le trottoir voit mon prénom sur le dossard et me dit "Oh, Stéphane, t'es parti pour 6h là". Le-mec-avec-la-crotte-au-cul m'avertit que la voiture-balai est juste derrière moi, un tracteur en réalité. Les sensations sont moyennes, pour pas dire bof bof. Je dépasse 2 concurrents, un septuagénaire avec vraisemblablement sa fille (je souhaite pour lui d'être allé au terme de la course, il a suscité mon admiration comme aucun autre concurrent). Je cours régulièrement, terriblement lentement, mais régulièrement, en prenant soin d'en avoir toujours un max sous le pied. De toute manière, je me contrefiche du temps pour ce premier marathon, je veux juste le terminer sans souffrance excessive.

Ravitaillement systématique avec mon camelback toutes les 15min et barre toutes les 40 min, et en plus je m'arrête 10 secondes à tous les ravitos pour de l'eau, un bout d'orange, une éponge...Au bout de 5km, peu avant Mutzig, la digestion est passée, les sensations sont enfin "bonnes". Je ne vais pas plus vite pour autant -lentement, mais sûrement- mais la distance à venir ne me fait plus peur. A Molsheim, au km10, je rentre véritablement dans la course, après avoir dépassé à mon rythme de sénateur une quarantaine de marathoniens. Les km 10 à 15 (de mémoire) sont longuets, on contourne des champs de maïs sur une piste cyclable parfaitement plate. j'ai le plaisir de courir quelques kilomètres avec des gens de chez moi, des Mentonnais déguisés en baigneur et avec le maillot "Les Mentonnais en Alsace". Quelques paroles échangées, ils me demandent comment ça va, je réponds que tout va bien, je suis venu avec "mes gels et mon bélin". Eclats de rires, seul un Mentonnais peut comprendre.

Au km15, la chaleur se fait écrasante, il est 10 heures, on traverse quelques villages. Les ravitaillements illustrent une qualité d'organisation exceptionnelle. Les derniers kilomètres avant le semi sont longs. Au km18, la pente est rude à la sortie du village, je décide de marcher, mais rapidement. Je me rends compte que je vais peut-être presque aussi vite. J'aurais dû faire Paris-Colmar tiens. Les 3km dans les vignes jusqu'au semi à Scharrachbergheim sont fatigants mais malgré les moments parfois plus durs, je ne cours que par plaisir. Je passe sous l'arche des 21.1km en 2h43min. Je ne pensais pas mettre autant, déjà qu'en mettant 2h20 à l'entraînement, je trouvais ça abusé... L'effet chaleur, certainement. Pas évident de s'entraîner 4 mois dans le froid et de courir sous plus de 30°C certainement au soleil. Un bisou à mes enfants et mon père qui a emmené ici mon épouse pour le départ du semi, et c'est reparti. Sensations bof, recourir un semi... je me serais bien assis à une terrasse. De toutes façons, le plaisir est là malgré la difficulté, et je n'abandonnerai certainement pas. Jamais. J'appréhende le km24, je n'avais jamais dépassé cette distance. Les cuisses et les mollets commencent à tirer, mais toute fatigue a étrangement disparu. C'est peut-être parce que pour ce passage des 24km, je me suis mis l'album "Relationship of Command" des At-The Drive-In dans mon MP3, écoutez plutôt, ça booste, non?:

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Les kilomètres défilent, je n'ai pas l'impression que ce soit si long, impossible d'accélérer,ou plutôt pas envie par peur du mur, mais je ne ralentis jamais, à part pour marcher aussi vite dans les montées :))). J'ai l'impression de ne plus être fatigué, mais les jambes tirent de plus en plus. Le parcours redevient vallonné du km 30 au 35, rien d'exceptionnel en terme de dénivelé, mais ça casse les jambes. Je décide alors de me doper avec de l'EPO (je sais c'est honteux), de l'Energie Par les Oreilles en écoutant les Pogues. Au passage du km32, je sais que j'arriverai au terme de ce marathon, et j'en suis très ému. Plein de moments de l'année passée remontent à la surface, des bons et des sacrément merdiques..., mais j'essaie de rester concentré et poursuis ma course à un rythme de métronome (je fais les 2 semis dans le même temps à peu près).

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Les 7 derniers kilomètres sont plats, je les savoure, MP3 rangé dans la poche, je cours depuis 4h40 et j'aime ça. Je suis lent, je n'arrive pas à faire mieux, mais je suis heureux. La course se termine sans grosse fatigue, pas de mur, mais avec des jambes en bois de chêne massif. Krampussine, qui a brillamment terminé son semi et mes enfants me rejoignent pour la ligne d'arrivée pour un moment inoubliable, à jamais, quelle que fût la qualité de la performance: 596è/ 715 classés, en 5h33min35sec. Le rêve est réalisé.

 

Edit: notre appareil photo (dans un brassard "New Balance") de marque Panasonic DSC Z3, avec notamment des photos de mon arrivée (dossard 598) en famille, a été oublié/ perdu très certainement près de l'office du tourisme ce Dimanche vers 15h, si quelqu'un le retrouve, merci de me le signaler ici, j'en serais plus que ravi. Récompense à la hauteur de ce que l'appareil vaut.

 

Le marathon en quelques chiffres:

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Commentaires
K
@tony: oulala, toi, tu veux m'emmener au "Rocher des Artistes" à Gégé je vois...<br /> <br /> @Thierry: ... et ouais...:/
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T
Bravo !<br /> <br /> Je vois qu'il n'y a pas que moi qui perd mes affaires !<br /> <br /> Thierry
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T
Félicitation mon gars, maintenant que je sais que tu tiens la distance nous allons pouvoir passé au choses sérieuses en montagne.<br /> <br /> A+ Tony.
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H
Magnifique commentaire d' une étape dans une vie qui forcément enrichi et doit redonné du "tonus" pour la suite .Bravo.
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